Le 14 avril prochain, Emmanuelle Vial, responsable aux éditions du Seuil du secteur poche (la collection « Points») lancera en France « Point Deux », une nouvelle collection de livres au format tout à fait particulier. D’abord édité aux Pays-Bas en septembre 2009 et produit depuis peu en Espagne (au Royaume-Uni et aux Etats-Unis plus tard en 2011), un nouveau genre de mini-livre nous sera proposé. Son format est inédit : 8 cm par 12 cm, la moitié d’un livre de poche. Compact et léger, le texte y est imprimé sur du papier Bible opacifié. Ce livre qui loge dans nos poches a surtout la particularité de s’ouvrir avec la tranche en haut, un peu comme un calendrier. Les pages se lisent alors de la page du haut à la page du bas. Jouant de sa maniabilité, il s’agit pour « Point Deux» de prendre le livre de poche au pied de la lettre et de séduire un public majoritairement urbain, qui aime lire dans les transports en commun par exemple.
« Point Deux » prévoit de publier des livres pratiques et de la littérature. La maison d’édition est propriétaires des droits d'exploitation de ses titres pendant deux ans et demi. Les neuf premiers qui seront mis en vente sont :
• Extrêmement fort et incroyablement près de Jonathan Safran Foer
• Tout est sous contrôle de Hugh Laurie
• Ce cher Dexter de Jeff Lindsay
• La Route de Cormac McCarthy
• Chronique de la haine ordinaire de Pierre Desproges
• Le Poète de Michael Connelly
• Des Vents Contraires d'Olivier Adam
• La Cinquième Femme de Henning Mankell
• Le Sens du Bonheur de Krishnamurti
Et dès mai-juin 2011, devraient s’ajouter entre autres : Du côté de chez Swann de Marcel Proust, Les Visages de Jesse Kellerman, Les Chutes de Joyce Carol Oates, Patience dans l'azur de Hubert Reeves, et même Le nouveau testament. Les titres phares des éditions du Seuil se retrouvent ici.
Ce nouveau format possède des avantages : sa taille donc, mais aussi son sens de lecture qui s’avère assez confortable (même s’il ne l’est pas plus que nos livres habituels), ainsi que sa solidité. Toutefois le papier est si fin qu’il faut tourner les pages avec précaution. Autre point négatif, ces livres coûtent entre 9 et 14 euros, ce qui semble plutôt onéreux pour un si petit objet.
Pour mieux aborder cette « Révolution » éditoriale, il est intéressant de se pencher sur le site de la collection, dont voici une capture d'écran de la page d’accueil :
La référence aux publicités Apple est explicite.
Même style de musique, de voix-off, même présentation sur fond blanc par quelqu’un dont on ne voit que les mains, même rythme, mais aussi même vocabulaire. Un champ lexical propre aux nouveaux médias est employé dans la vidéo de « Point Deux » : « revenir en arrière » « zoomer », « mettre en pause », « partager avec un ami ». Autant d’actions qui s’avèrent possible avec un livre et ne sont pas propres aux nouveaux supports de textes électroniques. e mot « application » notamment est présent dans les deux vidéos. Ce qui est mis en scène ici c’est la lutte du livre imprimé contre le monde électronique (que le sens dans lequel les pages sont tourné soit modifié e ne change rien, ce procédé étant plutôt de l’ordre du gadget). La parodie des publicités Apple est amusante quand bien même cette alternative au livre numérique semble limitée.
C’est une aventure exceptionnelle : celle d’un objet quotidien apparemment immuable qui se trouve soudain réinventé. La dernière fois qu’un tel événement s’est produit, c’était la naissance du livre au format de poche, il y a plus de 60 ans. C’est un livre, indiscutablement, et pourtant tout est différent. Il nous fera lire ailleurs, autrement, plus. Son originalité a la force de l’évidence, et passée la première surprise, il s’invite dans notre quotidien, s’impose sans qu’on y pense. C’est une réponse à la question que personne ne pose : à l’heure où le format numérique anime tous les débats, le livre en papier peut-il être amélioré, repensé, transformé ?» ( source : http://www.editionspoint2.com/multimedia/File/presse/Point2communiquedePresse.pdf)
L’éditrice cherche à conserver l’habitus culturalisé du livre tout en lui ajoutant le lustre du High-Tech. On retrouve chez « Point Deux » cette relation paradoxale, propre à la période de transition médiatique qui est la notre : entre conservation de la figure du livre et désir « révolutionnaire » par le recours à la culture numérique : « Avec Point Deux, le papier n’a pas dit son dernier mot ! » conclu le communiqué de presse. Il s’agit de conserver le public habitué au livre de poche tout en conquérant les digital natives.
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